Texte destiné au Comité de Soutien
« Les petits cons de la
Femis… Je ne dis pas que tous les élèves de la Femis sont
Mais c’est
difficile quand on vous forme à être un bon petit soldat. »
(Jean-Marie Straub)
Parce que la Femis n’est pas l’armée, parce que la
Femis se veut une école de cinéma, parce que la Femis en vaut encore le coup,
nous avons décidé le lundi 23 mars 2009 de nous arrêter pour réfléchir sur
notre école et de nous battre afin d’en faire un vrai lieu de rencontre, de
partage, de réflexion, d’ouverture et surtout de création cinématographique.
Dans la France
d’aujourd’hui, où d’intenses luttes sociales s’opposent à un
pouvoir arrogant, la créativité et la pensée semblent devenues suspectes.
Or, depuis des années, la Femis contribue, consciemment ou pas, à cet état des
choses. Elle est devenue une institution qui se noie dans son administration
lourde et l’autosatisfaction de son fonctionnement bien rodé.
L’extrait d’un
audit réalisé à la Femis en novembre 1999 pointait déjà le problème : « C’est
comme si la culture propre au milieu du cinéma avait déteint sur l’école et
c’est évidemment l’effet inverse qu’il faudrait atteindre. » Le
corporatisme, la hiérarchie, l’incompétence de décisionnaires qui favorisent
l’efficacité et le conformisme plutôt que l’originalité se retrouvent dans
notre école. Refusant cette fatalité, nous souhaitons briser cet état des
choses.
Nous entrons
dans cette école avec des envies de cinéma, nous en sortons avec une impression
de gâchis. Nous ne voulons bien sûr pas nous dédouaner entièrement de la
responsabilité des films que nous faisons. Reste que cette école est une
vieille machine ronronnante où surtout rien ne doit changer, où les cahiers des
charges des exercices imposés ne sont pas des contraintes propres à stimuler
l’inventivité, mais des oeillères, des verrous. La tension entre contrainte et
liberté qui est le propre de la création et sur laquelle une école d’art nous
semble tout de même tenue d’avoir des idées, n’est soutenue par aucune pensée.
La Femis devrait favoriser les expérimentations et les prises de risque, au
lieu de cela elle les inhibe.
Faisons de
cette école un laboratoire de nouveaux supports, de nouveaux processus de
fabrication du cinéma, et donc de nouvelles formes.
Las de
réclamer sans cesse de petites réformettes, nous nous sommes rendus compte de
l’importance de revoir les fondements de cette école. Depuis 10 jours, nous
avons mis en chantier des réflexions sur la structure même de la Femis. Des
réformes profondes doivent être prises pour que le collectif prenne le pas sur
un apprentissage qui favorise actuellement l’élitisme, le cloisonnement des
départements et l’individualisme.
Nous dénonçons
l’autocratie en place qui a main-mise sur les décisions administratives et
pédagogiques. Aujourd’hui, un contre pouvoir est né, représenté par les élèves
de la Femis, et nous demandons à ce que l’équilibre entre les directions soit
rétabli.
Nous demandons
que la pensée du cinéma soit remis au centre de cette école, souhaitant laisser
plus de place aux cinéastes dans l’élaboration de projets pédagogiques.
Nous voulons redonner envie aux personnes de
l’extérieur de venir à la Femis, par le biais de cartes blanches, de
résidences, d’un festival, d’un lieu plus chaleureux et accueillant.
Nous voulons une ouverture des locaux et du matériel
à des cinéastes et productions externes. Que la Femis cesse d’être la tour
d’ivoire qu’elle est devenue.
Nous voulons une revalorisation du statut des
intervenants professionnels : que les heures passées sur les
tournages de la Femis puissent être pour eux des heures d’intermittence (ce qui
n’est pas le cas actuellement ! étrange paradoxe pour une école qui forme
de futurs intermittents…), que l’intervenant soit à l’initiative de l’exercice
qu’il anime, au lieu de se contenter du suivi d’un cahier des charges établi
par avance par la direction.
Pour toutes ces raisons et d’autres encore, nous
avons besoin d’échanger avec vous sur ce que pourrait être la Femis de demain.
Nous vous invitons à venir nous rencontrer pour exprimer vos idées, vos
accords, vos désaccords. Nous avons le privilège de pouvoir faire du cinéma
dans cette école, c’est pourquoi nous considérons comme notre devoir de la
repenser, mais il nous semble fondamental de le faire avec ceux qui pratiquent
et pensent cet art.
Les Etats Généraux de la Femis